Exécution d'une décision des prud'hommes

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Tribunal prud'hommes

Dans certaines circonstances, les obligations et condamnations prévues par la décision prud'homale n'auront d'effet que suite à l'intervention d'un huissier ou commissaire de justice.

Le jugement des prud'hommes est l'ultime étape du procès prud'homal, car elle matérialise la décision du conseil des prud'hommes.

Ensuite, selon les cas, l'une des parties pourra :

  • contester la décision en faisant appel ou via une autre voie de recours ;
  • faire exécuter la décision par huissier ou commissaire de justice si c'est nécessaire.

Bon à savoir : depuis le 1er juillet 2022, les professions d’huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire sont regroupées au sein de la profession de commissaire de justice. Le décret n° 2018-129 du 23 février 2018 prévoit les conditions de la formation spécifique permettant aux commissaires-priseurs judiciaires et aux huissiers de justice en exercice de devenir commissaires de justice et d'être nommés dans un office de commissaire de justice. À compter du 1er juillet 2026, les anciens huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires ne pourront plus exercer s’ils n’ont pas suivi la formation de commissaire de justice.

Exécution d'une décision des prud'hommes : application du contenu

Exécuter une décision prud'homale, c'est obtenir son accomplissement et sa réalisation matérielle de façon amiable ou contrainte.

Faire exécuter la décision des prud'hommes : si refus du « perdant »

La décision prud'homale comporte une partie finale qui énumère et détaille les obligations, diligences et condamnations infligées aux parties ou à une partie :

  • la partie sous le coup de ces contraintes peut les accepter ou les refuser ;
  • si elle les refuse, la partie adverse qui a gagné le procès doit envisager de faire exécuter la décision.
Exécution d'une décision des prud'hommes
Exécution volontaire Exécution forcée
La partie condamnée du fait de la décision prud'homale accepte le principe + la nature des effets de la condamnation et par conséquent :
  • n'oppose aucun refus ;
  • satisfait aux exigences et obligations pesant sur elle (ex : paiement immédiat de salaires impayés jusqu'alors).

La partie condamnée du fait de la décision prud'homale refuse le principe + la nature des effets de la condamnation et ne veut pas satisfaire aux exigences et obligations pesant sur elle.

Il faut donc la contraindre à satisfaire et honorer ces exigences et obligations en recourant à un huissier ou commissaire qui :

  • procède d'abord à la signification (transmission/notification) de la décision prud'homale et de son contenu ;
  • procède ensuite à l'exécution de la décision prud'homale et de son contenu (ex : obtenir le paiement de salaires impayés jusqu'alors).

À noter : l'huissier de justice possède, de par la loi, des prérogatives lui permettant de procéder au recouvrement contraint de sommes d'argent notamment par saisie sur compte bancaire.

À noter : certaines statistiques laissent supposer que 30 % des jugements prud'homaux rendus au bénéfice des salariés ne sont jamais exécutés.

Échec exécution décision prud'hommes par huissier ou commissaire de justice

Dans certains cas, la partie condamnée au paiement de diverses sommes d'argent fait obstacle au recouvrement de l'huissier ou commissaire de justice voire le tient en échec.

Dans ce cas, la partie devant normalement bénéficier du paiement des sommes devra se tourner, non pas vers le conseil des prud'hommes, mais vers le tribunal judiciaire pour tenter d'obtenir le paiement de son dû.

Cela implique :

  • de faire un nouveau procès pour obtenir une nouvelle décision de justice plus contraignante pour le débiteur ;
  • de prendre obligatoirement un avocat.

Conditions d'exécution forcée de la décision des prud'hommes

L'exécution forcée de l'ordonnance ou du jugement prud'homal(e) suppose que celui-ci ou celle-ci ne puisse pas être remis en question.

Exécution forcée d'une décision des prud'hommes : 3 conditions

Les 3 conditions à l'exécution forcée :

  • la décision doit avoir été préalablement notifiée par le greffe du conseil des prud'hommes (ou du tribunal judiciaire) ou signifiée par voie d'huissier ou commissaire de justice (solution plus sûre) ;
  • l'huissier ou commissaire de justice qui procédera à l'exécution de la décision doit être en possession d'une « grosse » de la décision c'est-à-dire d'une copie certifiée de celle-ci revêtue de la « formule exécutoire » qui doit être demandée au greffe ;
  • la décision doit avoir acquis définitivement l'autorité et la force de la chose jugée.

Bon à savoir : les greffes des tribunaux judiciaires (ou de leurs tribunaux de proximité) et ceux des conseils de prud’hommes situés dans une même commune ont fusionné le 1er janvier 2020 (article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation et de réforme pour la justice).

Décision des prud'hommes et exécution forcée

Voici quelles sont les caractéristiques de l'exécution forcée.

Définition

Une décision acquiert l'autorité de la chose jugée quand elle ne peut plus faire l'objet d'un recours suspensif : appel ou opposition.

Cela signifie que le délai pour intenter un recours est définitivement écoulé sans que le recours n'ait été entrepris.

Conséquences

Depuis le 1er janvier 2020, l'exécution provisoire est devenue le principe : l'article 514 du Code de procédure civile prévoit en effet que « les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n'en dispose autrement ».

Dans certains cas cependant, la loi ou le juge peuvent écarter cette exécution provisoire. C'est le cas en matière prud'homale. L'article R. 1454-28 du Code du travail (modifié par le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019) dispose en effet que « à moins que la loi ou le règlement n'en dispose autrement, les décisions du conseil de prud'hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire »Ainsi, en principe, quand une partie conteste une décision rendue par un conseil des prud'hommes, cette contestation a un effet suspensif : la décision ne peut pas produire d'effet avant que l'affaire n'ait été rejugée et la décision confirmée suite au second procès.

Principe : appel et opposition ont un effet suspensif, ils empêchent l'exécution de la décision.

Exception : appel et opposition n'ont pas d'effet suspensif quand la décision bénéficie de l'exécution provisoire.

Aspects pratiques

La preuve de l'autorité de la chose jugée est apportée par la production d'un certificat de non-appel ou de non-opposition délivré par le greffe du conseil des prud'hommes ou du tribunal judiciaire, certificat qui démontre que la décision n'a pas été contestée dans les délais et qu'elle est donc à l'abri de tout recours.

Exécution provisoire d'une décision des prud'hommes

L'exécution provisoire permet à la partie qui a gagné son procès d'obtenir l'exécution immédiate de la décision prud'homale dès sa notification, même si son adversaire exerce un recours et fait appel ou opposition.

Elle permet donc de passer outre l'effet suspensif de ces voies de recours.

L’exécution provisoire peut être de plein droit ou prononcée par le juge. En matière prud’homale, plusieurs textes mentionnent l’exécution provisoire de plein droit. Ainsi, l’article R. 1454-28 du Code du travail prévoit l’exécution provisoire de plein droit dans le cas de jugements :

  • qui ne sont susceptibles d’appel que par l’effet d’une demande reconventionnelle ;
  • qui ordonnent la remise de certificats de travail, de bulletins de paye, ou de toute pièce que l’employeur est tenu de délivrer ;
  • qui ordonnent le paiement des rémunérations et indemnités dans la limite de neuf mois de salaires maximum.

Les ordonnances de référés bénéficient également de l’exécution provisoire de plein droit.

Si l’exécution provisoire n’est pas de plein droit, elle peut être ordonnée par le juge pour tout ou partie de la condamnation, à la demande des parties ou même d’office sauf pour les dépens.

Cependant, il y a trois limites :

  • Cette exécution pourra aussi bien être remise en cause par une décision ultérieure rendue :
    • soit suite au recours (appel, opposition) ;
    • soit par la juridiction saisie du fond du litige : dans ce cas, et si l'exécution provisoire est annulée après avoir porté sur des sommes d'argent, celles-ci devront être remboursées.
  • Cette exécution ne concerne que certaines sommes d'argent (salaires, indemnités de congés payés, indemnité de préavis, indemnités de licenciement...) dont le montant est plafonné (le total des sommes ne peut excéder l'équivalent de 9 mois de salaires).
  • Cette exécution peut faire l'objet d'un recours devant la cour d'appel par celui contre lequel elle est entreprise afin d'être interrompue.

Aussi dans la rubrique :

Déroulement de la procédure devant le conseil de prud'hommes

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