Harcèlement managérial

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Femme métisse ou africaine qui subit une discrimination, bureau ordinateur Getty Images / michaeljung

Le harcèlement moral est le fait pour le salarié de subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (article L. 1152-1 du Code du travail). Parfois, les choix de l’employeur en matière de méthodes de management peuvent entraîner une situation de harcèlement moral pour les salariés. On parle alors de harcèlement managérial.

Qu’est-ce que le harcèlement managérial ?

Peuvent caractériser un harcèlement moral, les méthodes de gestion mises en œuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu'elles se manifestent pour un salarié déterminé, par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (Cour de cassation, 10 novembre 2009, n° 07-45.321). On parle alors de harcèlement managérial. Ce type de harcèlement moral constitue un harcèlement collectif.

Bon à savoir : les faits présentés par un salarié pour démontrer un harcèlement moral doivent être examinés dans leur ensemble. Ainsi, il est possible que les « agissements répétés » requis pour qualifier le harcèlement moral se caractérisent par plusieurs faits isolés, de nature différente et qu’il convient d’examiner dans leur ensemble (Cass. soc., 26 juin 2019, n° 17-20.723).

Dans quel cas le harcèlement managérial peut-il être sanctionné ?

Pour pouvoir être sanctionné, il est nécessaire que les techniques de management utilisées par l'employeur ou le supérieur hiérarchique envers tous les salariés conduisent à produire les effets du harcèlement moral pour un salarié pris individuellement. Il en est ainsi en cas de dégradation de ses conditions de travail, de dégradation de sa santé physique et mentale, etc.

Selon les juges, des méthodes de gestion du personnel, assorties de pressions incessantes de directives contradictoires, peuvent, en ce qu’elles dépassent le management classique et en ce qu’elles sont susceptibles de générer un stress pour certains salariés, être considérées comme du harcèlement managérial (Cour d’appel de Fort-de-France, 30 mai 2014).

En pratique, les juges n’analysent pas les effets collectifs de la méthode de management mais les effets individuels sur chacun des salariés concernés.

À noter : des comportements du supérieur hiérarchique excédant les limites du pouvoir de direction, comme un ton excessif, des remarques inadaptées ou un comportement critiquable à l’égard du personnel, peuvent constituer un harcèlement moral (Cass. crim., 19 juin 2018, n° 17-82.649).

Bon à savoir : si le salarié se trouve dans une situation de violence morale en raison du harcèlement moral qu'il subit au moment de la rupture du contrat de travail, la rupture conventionnelle signée par lui et par l'employeur est considérée comme nulle au motif que le consentement du salarié était vicié (Cass. soc., 29 janvier 2020, n° 18-24.296).

Le bore-out consiste pour un salarié à souffrir d’épuisement professionnel par l’ennui (c’est l’inverse du burn-out). Les juges considèrent que le bore-out peut être constitutif de harcèlement moral dès lors que l’employeur ne démontre pas que le bore-out n’est pas lié à des agissements constitutifs d’un harcèlement moral et que la décision de licencier le salarié est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (CA Paris, 2 juin 2020, RG 18/05421).

Que peut faire le salarié victime de harcèlement managérial ?

Si un salarié estime être victime de harcèlement managérial, il a la possibilité de se rapprocher des représentants du personnel de l’entreprise : délégués du personnel, membres du comité d’entreprise ou encore membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Le salarié peut également s’adresser à l'inspection du travail. En effet, l’agent de contrôle de l'inspection du travail peut constater les infractions commises en matière de harcèlement moral dans le cadre des relations de travail.

Bon à savoir : un salarié victime ou témoin de faits de harcèlement moral ou sexuel, qui les dénonce, fait l’objet d’une protection. Il ne peut pas être sanctionné. Toutefois, le salarié peut être poursuivi pour diffamation s’il a dénoncé les faits de harcèlement à des personnes autres que l’employeur ou les organes de contrôle du Code du travail (Cass. crim., 26 novembre 2019, n° 19-80.360). Dès même, si le salarié dénonce des faits de harcèlement moral ou sexuel en ayant connaissance, au moment de la dénonciation, de la fausseté des faits allégués, la qualification de dénonciation calomnieuse peut être retenue en raison de sa mauvaise foi.

De même, le harcèlement pouvant avoir de graves conséquences sur la santé du salarié (par exemple, dépression, etc.), le médecin du travail et le médecin traitant peuvent être sollicités pour bénéficier d'un suivi médical adapté.

Après avoir tenté de se rapprocher de ces différents acteurs de l’entreprise, le salarié victime peut également saisir le conseil de prud'hommes (CPH) pour obtenir la réparation du préjudice subi.

En pratique, le salarié doit rapporter la preuve suffisante d’avoir été victime de comportements de harcèlement ayant entraîné la dégradation de ses conditions de travail ou la détérioration de sa santé. En effet, selon les juges, les méthodes de travail ne peuvent être assimilées à des actes de harcèlement en l’absence de toute démonstration de faits objectifs, précis et concordants (Cour d’appel de Nîmes, 15 avril 2014).

Si les faits établis par le salarié permettent de présumer l’existence d’un harcèlement, il incombe alors à l’employeur de prouver que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement mais sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

À noter : le fait de ne pas être physiquement présent dans l’entreprise n’empêche pas un salarié de se déclarer victime de harcèlement moral de la part de son employeur. En effet, le contrat de travail n’étant pas rompu, le salarié qui est dispensé d’activité peut faire l’objet de harcèlement moral (Cass. soc., 26 juin 2019, n° 17-28.328).

Bon à savoir : suite à une dénonciation de harcèlement, l’employeur est tenu de déclencher une enquête interne et contradictoire. Il doit entendre les arguments du salarié prétendu victime de harcèlement et de celui qui en est accusé. À défaut, l’employeur court le risque de se voir reprocher un manquement à son obligation de sécurité même si le salarié prétendu victime n’a pas réussi à démontrer qu’il avait été victime de harcèlement (Cass. soc., 27 novembre 2019, n° 18-10551).

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