Requalification du CDD en CDI

Sommaire

Requalification d'un cdd en cdi

Le salarié peut obtenir la requalification de son CDD en CDI par les prud'hommes dans des délais très courts.

Le conseil de prud'hommes est la juridiction à laquelle doit être soumis le contentieux de la requalification du CDD en CDI.

Il statue également sur d'autres litiges spécifiques liés au contrat de travail, comme :

Requalification CDD en CDI : suite au non-respect du droit

Recours, formalisation, utilisation, prolongation et reconduction du contrat de travail à durée déterminée (CDD) sont soumis à des règles strictes.

À noter : la requalification d’un CDD en CDI a pour conséquence de replacer le salarié dans la situation qui aurait été la sienne s’il avait été embauché dès l’origine dans le cadre d’un CDI. Ainsi, cette requalification peut entraîner à la fois le maintien d’une rémunération plus favorable acquise sous l’empire du CDD, mais aussi le bénéfice de primes et avantages prévus dans le cadre du CDI qui devait initialement s’appliquer (Cass. soc., 8 juillet 2020, n° 18-21.942).

Leur non-respect entraîne plusieurs types de sanctions, dont la requalification du CDD illicite en contrat de travail à durée indéterminée (CDI) avec toutes conséquences de droit. Cette requalification découle d'une procédure judiciaire, laquelle doit être intentée devant le conseil de prud'hommes.

Cette procédure implique deux dérogations par rapport à la procédure prud'homale habituelle :

  1. Le bureau de jugement est saisi directement.
  2. Il doit rendre une décision dans le délai d'un mois après sa saisine.
Comprendre le droit du travail Lire l'article

Prud'hommes et requalification du CDD en CDI : exception

La procédure prud'homale de requalification d'un CDD en CDI est une procédure d'exception : le bureau de jugement des prud'hommes est saisi directement, sans phase de conciliation préalable.

L'affaire est portée directement devant le bureau de jugement pour qu'il :

  • statue en urgence ;
  • juge la relation de travail à durée déterminée soumise à son examen illicite en raison de faits comme de la violation d'un certain nombre de dispositions légales ;
  • décide de requalifier la relation de travail à durée déterminée en relation de travail à durée indéterminée avec toutes conséquences de droit (transformation automatique de la nature du contrat de travail + indemnisation du salarié passé du CDD au CDI).

Condition requalification du CDD en CDI : non-respect de la législation CDD

Circonstances de la saisine du conseil de prud'hommes

La saisine du conseil de prud'hommes aux fins de requalification d'un CDD en CDI n'est possible que dans certaines circonstances : faits + non-respect des dispositions légales.

Conditions de requalification du CDD en CDI par les prud'hommes
Recours et utilisation du CDD
  • Utilisation du CDD afin de pourvoir un emploi ressortant de l'activité permanente de l'entreprise.
  • Utilisation du CDD en dehors des cas de recours prévus par la loi.
Rédaction et formalisation du CDD
  • CDD à terme précis dont le contenu ne prévoit pas de date de fin.
  • CDD à terme imprécis dont le contenu ne prévoit pas de durée minima et/ou ne donne pas l'indication de l'événement devant entraîner sa fin.

À noter : l’employeur n’est pas tenu d’informer le salarié par écrit du terme du CDD à terme imprécis. Il peut donc mettre fin à un CDD de remplacement sans terme précis par simple appel téléphonique le jour où l’absence du salarié remplacé a définitivement pris fin. Dans ce cas, le salarié n'est pas fondé à demander la requalification du CDD en CDI (Cass. soc., 18 septembre 2019, n° 18-12.446).

  • CDD non motivé (pas d'indication du cas de recours) ou mal motivé (indication erronée, imprécise ou ambiguë du cas de recours).
  • Défaut de formalisme :
    • absence de contrat écrit ;
    • incapacité pour l'employeur de fournir un contrat écrit ;
    • absence de signature ;
    • incapacité pour l'employeur de fournir un contrat signé.

Exemple : la Cour de cassation a jugé que l’absence de signature d’un CDD par l’une des parties entraînait sa requalification en CDI (Cass. soc., 14 novembre 2018, n° 16-19.038), sauf si le salarié a délibérément refusé de signer le contrat de travail, étant de mauvaise foi ou dans une intention frauduleuse (Cass. soc., 22 mai 2019, n° 18-11.350).

  • Défaut de transmission du contrat :
    • absence pure et simple de transmission d'un exemplaire du contrat au salarié ;
    • incapacité pour l'employeur de prouver la transmission du CDD au salarié.

Bon à savoir : la méconnaissance de l'obligation de transmettre un contrat écrit au salarié dans les 2 jours ouvrables suivant son embauche (article L. 1242-13 du Code du travail) n'entraîne plus à elle seule une requalification du CDD en CDI. Elle ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être supérieure à un mois de salaire (article L. 1245-1 alinéa 2 du Code du travail, issu de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail).

À noter : la Cour de cassation a assoupli sa jurisprudence relative à la requalification du CDD en CDI (Cass. soc., 3 mai 2018, n° 16-20.636). Désormais, lorsqu'un CDD est conclu pour le remplacement d'un salarié, la qualification du salarié n'a pas à être obligatoirement mentionnée si la fonction renvoie à une qualification professionnelle précisément définie par la grille de classification de la convention collective applicable.

Durée et utilisation du CDD
  • CDD dont la durée d'exécution dépasse les durées maximales prévues par la loi en fonction du cas de recours.
  • CDD prolongé et/ou reconduit de façon à ce que sa durée d'exécution dépasse les durées maximales prévues par la loi en fonction du cas de recours.
  • CDD utilisé successivement (plusieurs CDD de suite avec le même salarié et/ou sur le même poste) :
    • sans respect du délai d'attente (1/2 ou 1/3 temps) ;
    • sans respect du délai de séparation ;
    • avec un enchaînement formant un emploi permanent ressortant de l'activité permanente de l'entreprise.

Auteurs de la saisine : salarié en CDD ou organisation syndicale

La saisine directe du bureau de jugement aux fins de requalification du CDD en CDI peut être opérée par :

  • le salarié (sous CDD) lui-même ;
  • une organisation syndicale représentative (au plan national considérant ses résultats aux élections prud'homales).

Pour que l'organisation syndicale puisse valablement saisir le bureau de jugement du conseil de prud'hommes, elle doit d'abord :

  • Informer par écrit le salarié de son intention d'agir en justice.
  • Préciser dans ce courrier :
    • les nature et objet de l'action envisagée ;
    • le fait que l'organisation syndicale va mener la procédure y compris les éventuelles voies de recours.
  • Indiquer au salarié qu'il pourra, à tout moment :
    • intervenir dans le procès ;
    • y mettre fin ;
    • ou s'opposer à l'intervention du syndicat et ce, dans la quinzaine suivant la réception du courrier : le salarié a le droit de refuser l'intervention de l'organisation syndicale.

À noter : un employeur ne peut pas agir pour obtenir une requalification lui permettant d'échapper aux conséquences financières d'une rupture anticipée - illicite - du CDD.

Droit du contrat de travail Lire l'article

Requalification du CDD en CDI : saisine directe du bureau de jugement par requête

Depuis le 1er août 2016, la saisine directe du bureau de jugement s'effectue par requête. La requête est faite, remise ou adressée au greffe du conseil de prud'hommes.

Bon à savoir : les greffes des tribunaux judiciaires (ou de leurs tribunaux de proximité) et ceux des conseils de prud'hommes situés dans une même commune ont fusionné le 1er janvier 2020 (article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation et de réforme pour la justice).

À peine de nullité, la requête comporte les mentions prescrites à l’article 58 du Code de procédure civile. Par ailleurs, elle contient un exposé sommaire des motifs de la demande et mentionne chacun des chefs de celle-ci. Elle doit être accompagnée des pièces que le demandeur souhaite invoquer à l’appui de ses prétentions. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.

La requête et le bordereau sont établis en autant d’exemplaires qu’il existe de défendeurs, en plus de l’exemplaire destiné à la juridiction (article R. 1452-2 du Code du travail).

Licenciement travailleur handicapé Lire l'article

Pouvoirs des prud'hommes pour la requalification du CDD en CDI

Le juge prud'homal transforme le CDD en CDI et condamne l'employeur à verser une indemnité de requalification, voire à verser les sommes dues en cas de licenciement.

Comme la procédure de requalification est une procédure d'exception, le bureau de jugement dispose de prérogatives spécifiques :

Requalification CDD en CDI : pouvoirs du bureau de jugement
Pouvoir de requalification juridique
  • Requalification automatique du contrat de travail : CDD => CDI.
  • Dès qu'il y a requalification automatique, l'employeur :
    • Ne peut invoquer ni sa bonne foi ni une erreur de sa part.
    • Ne dispose plus de la possibilité de :
      • a) se prévaloir de l'existence d'un CDD ;
      • b) de prouver cette existence.
Indemnisation de la requalification Condamnation à indemnisation du salarié par l'employeur :
  • indemnité de requalification : montant minimum = 1 mois de salaire (base : dernier salaire perçu avant saisine du conseil de prud'hommes) ;
  • éventuels rappels de salaires et autres demandes financières portant sur l'exécution ou la fin du CDD.

Bon à savoir : les rappels de salaire constituent des revenus différés qui n'entrent pas dans le champ du prélèvement à la source. Ils n'ouvrent pas droit au bénéfice du crédit d'impôt de modernisation du recouvrement (CIMR) en 2019. Ils doivent être déclarés dans la déclaration des revenus de l'année pendant laquelle ils ont été perçus (rép. min., n° 13747, JOAN du 30 avril 2019).

Éventuelle indemnisation d'un licenciement

Si au moment de l'action judiciaire, le CDD requalifié en CDI n'est plus en cours, le juge peut considérer que cela équivaut à une rupture de CDI donc à un licenciement indemnisable comme tel avec paiement par l'employeur :

  • d'un préavis ;
  • d'une indemnité de licenciement sous condition d'ancienneté ;
  • de dommages-intérêts en l'absence d'un motif réel et sérieux de licenciement.

À noter : les indemnités de requalification et celles en lien avec un licenciement (éventuellement abusif) se cumulent.

Bon à savoir : pour calculer l'indemnité compensatrice de préavis lorsque des CDD successifs sont requalifiés en CDI, il convient de prendre en compte la rémunération que le salarié aurait dû percevoir s'il avait pu exécuter le préavis (Cass. soc., 2 juin 2021, n° 19-18.080).

Effets de la décision rendue Le conseil de prud'hommes statuant en requalification rend une décision d'effet et d'exécution immédiats :
  • Le jugement est exécutoire à titre provisoire (même si l'employeur fait appel de la décision).
  • Les indemnités prévues par le jugement doivent être payées de suite.
Clause de mobilité dans l’accord de travail : les conditions Lire l'article

Requalification du CDD en CDI : procédure en 1 mois

La procédure de requalification du CDD en CDI correspond à la deuxième phase de la procédure prud'homale ordinaire (phase de jugement).

Cependant, il existe une exception : le délai. Le bureau de jugement, saisi directement pour une action en requalification, doit normalement rendre sa décision dans le mois qui suit sa saisine.

Remarque : ce délai est théorique, compte tenu de l'encombrement des conseils de prud'hommes : son non-respect n'entraîne pas la nullité ultérieure du jugement en cas de contestation par une des parties au procès.

Contrat de travail Lire l'article

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